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Tout commence par un banal accrochage en voiture sur le parking d’un supermarché. Matty, femme au foyer, rencontre Johnny, un chauffeur routier dragueur et maladroit. S’ensuit une histoire d’amour atypique entre ces deux personnages quelque peu amochés par la vie : Matty, 41 ans, femme de caractère, en pleine séparation, et Johnny, 29 ans, qui donne encore son linge à laver à sa mère. Matty se retrouvera rapidement à devoir choisir entre cet homme avec lequel elle ne semble rien partager et son mari, qui lui promet qu’il va revenir.
Christophe Van Rompaey nous plonge dès le début dans l’univers de son film. Matty, dépassée, erre dans un supermarché et pousse son caddie avec peu d’entrain. On pourrait croire à une comédie sociale ou au portrait d’une famille belge défavorisée. Cependant, ce début est filmé de manière très dynamique et fluide, ce qui augure d’une belle énergie. Dès les cinq premières minutes du film nous sommes captivés. La scène de la rencontre de Matty et Johnny ne traîne pas et donne le ton : humour et légèreté. L’équilibre entre l’aspect comique et l’aspect sentimental est parfaitement maîtrisé. Le résultat séduit par sa modestie : efficace sans aucune prétention. La trame sentimentale est soulignée par une image soignée. On peut remarquer un beau travail sur le sépia qui donne un effet vieilli à cette image. Ce choix de traitement de l’image renforce la poésie de ces personnages et de cette histoire d’amour. La musique composée d’accordéon et de piano est aussi utilisée pour renforcer la mélancolie et la poésie de cette histoire d’amour. Elle fait partie de la beauté du film et est utilisée à bon escient, de manière très juste sans effet larmoyant et pathétique.
La trame narrative reste néanmoins tout de même un peu classique, le déroulement de l’histoire est sans grande surprise. On s’attend à cette histoire d’amour, à ses hauts et ses bas et à ce happy end. Les personnages sont en revanche très attachants. Werner est la figure de l’artiste torturé, professeur de dessin aux Beaux Arts qui tombe amoureux de sa jeune élève de 20 ans. Ce personnage est un peu caricatural mais reste drôle et utile dans le parcours initiatique de Matty qui doit faire un choix. Johnny, quant à lui, reste le personnage le plus abouti. Il est l’opposé parfait de Werner : pas réellement artiste, ni intellectuel mais travaillant dur sans être idiot pour autant. Poète maladroit, il reste absolument touchant et sincère. C’est pour cette raison qu’il gagne le cœur de Matty. En effet, Johnny n’est pas doté d’une beauté physique particulière comparé au personnage de Werner, l’artiste débraillé et charmeur au petit côté Tom Waits. C’est donc la beauté intérieure, la générosité et la spontanéité qui l’emportent sur la beauté physique.
L’aspect humain prédomine dans ce film. Et cette victoire de la sincérité, de l’amour honnête et spontané qui l’emporte sur le snobisme de l’artiste torturé et complètement perdu est une belle leçon de vie. Des personnages simples mais attachants, une image soignée, une histoire d’amour loin d’être niaise ; le tout fonctionne parfaitement. Un film efficace auquel nous ne pouvons qu’adhérer. On sort de la salle souriant et heureux.
Léa Werwinsky élève de Terminale L, spécialité cinéma, Lycée Louis Armand à Chambéry.
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